Cour Suprême du Cameroun

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Chambre sociale

AFFAIRE:

Tankoua Jean

C/

Compagnie d'Assurances Générales Chanas et Privat

ARRET N° 59/S DU 4 JUIN 1981

LA COUR,

Vu le mémoire ampliatif déposé le 28 février 1980 par Maître Taffou Djimoun Laurent Avocat à Douala ;

Sur le moyen unique de cassation, substitué d'office à ceux proposés, pris de la violation, fausse application de l'article 81 de l'ordonnance n°59/100 du 31 décembre 1959, et des règles spéciales en matière de courtes prescriptions ;

En ce que l'arrêt confirmatif attaqué a accueilli l'exception de prescription opposée à l'action en paiement de rentes viagères introduites par Tankoua Jean aux noms des ayants-cause de feu Wandji Aser, de son vivant chef monteur à l'entreprise Gecicam, bien que la Compagnie d'Assurances Générales Chanas et Privat, assureur de l'employeur du decujus, ait contesté le fondement de la réclamation en l'état du dossier, alors que la prescription biennale de l'article 81 susvisé, fondée sur une présomption de paiement, peut toujours être détruite par un aveu contraire même implicite, émané du débiteur, et qu'en l'espèce, l'organisme assureur-accidents de travail ayant discuté le principe de l'action reconnaissait par là même implicitement n'avoir pas réglé les indemnités litigieuses et ne pouvait donc se prévaloir de ladite prescription ;

Vu l'article 81 de l'ordonnance n°59/100 du 31 décembre 1959 portant réparation et la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ;

Attendu qu'à l'instar des courtes prescriptions établies par les articles 2271 à 2273 du Code civil, celle de l'action en indemnités prévue par l'ordonnance précitée sur les accidents du travail repose sur une présomption légale de paiement ; qu'elle est donc inapplicable au cas où celui qui l'invoque reconnaît expressément ou tacitement qu'il n'a pas payé la somme réclamée ;

Attendu que le jugement dont l'arrêt confirmatif attaqué s'est approprié les motifs énonce que par déclaration introductive d'instance en date du 2 juillet 1974, Tankoua Jean agissant en qualité d'administrateur des biens de la succession de feu Wandji Aser, décédé le 18 janvier 1968 des suites - selon le demandeur de la rechute des lésions que le decujus avait contractées de son vivant dans un accident du travail font il avait été victime le 17 mai 1963 alors qu'il était au service de la Gecicam souscripteur d'une police d'assurance accidents de travail auprès de la Compagnie d'Assurances Générales Chanas et Privat, a attrait cette dernière devant le Tribunal de Grande instance de Yaoundé pour réclamer le paiement des rentes viagères pour 2 veuves, 7 enfants et la vieille mère du défunt à compter du 19 janvier 1968 ;

Attendu que dans ses conclusions reproduites en dispositif aux qualités du même jugement et reprises en appel, le conseil de la Compagnie d'Assurances Générales Chanas et Privat avait, non seulement excipé de la prescription de l'article 81 de l'ordonnance n°59/100 précitée, mais aussi sollicité subsidiairement du Tribunal de «dire la demande des ayants-cause de Wandji Aser irrecevable en l'état faute d'avoir rapporté la preuve du rapport de causalité entre le décès de leur auteur et un quelconque accident de travail» ;

Attendu que par ces dernières conclusions l'organisme assureur accidents de travail contestait le fondement de la réclamation en l'état du dossier et reconnaissait par là même implicitement n'avoir pas réglé les indemnités litigieuses ;