COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU

(BURKINA FASO)

-------

AFFAIRE:

Société COLINA Assurances

C/

Cabinet d'Audit Financier et d'Expertise Comptable KOMBOIGO & Associés (CAFEC-KA) SARL

Ordonnance de référé n° 28 du 15 mai 2003

Attendu que par ordonnance n° 054 du 14 mars 2003, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, visant l'article 433 du code de procédure civile, se déclare incompétent à prononcer la nullité d'une saisie-attribution pratiquée en vertu d'une ordonnance de taxe n° 2505 du 20 septembre 2002, dont la validité en tant que titre exécutoire est contestée, motifs pris de ce que le juge des référés est incompétent à apprécier la régularité du titre servant de base aux mesures d'exécution forcée ; Que contre cette ordonnance, appel est relevé le 24 mars 2003 par la société COLINA Assurances, qui à même acte, assigne la partie adverse, le Cabinet d'Audit Financier et d'Expertise Comptable KOMBOIGO & Associés (CAFEC-KA) à l'audience du 10 avril 2003 ; que la cause, après renvois pour production de l'ordonnance est retenue à l'audience du 17 avril 2003 et mise en délibéré au 15 mai 2003 où elle est vidée ;

Attendu que l'appelant conclut à l'infirmation de l'ordonnance entreprise en ce que la saine application des articles 433, 464-2è, 538 et 665 du code de procédure civile, 49, 153, 170 et suivants de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution assoit la compétence du juge des référés à apprécier la contestation d'une saisie-attribution fondée sur la validité du titre exécutoire servant de fondement à la saisie et à en ordonner main-levée lorsque le titre n'est pas exécutoire ; que pour une ordonnance de taxe rendue le 20 septembre 2002 une attestation de non appel est délivrée le 16 décembre 2002 alors que la signification dans la forme prescrite à l'article 661 du code de procédure civile, faisant seule courir le délai d'appel d'un mois, n'avait pas encore été effectuée ; Que la suite de la procédure conduisant à l'apposition de la formule exécutoire s'en trouve ainsi viciée ; Que la signification par ministère d'huissier de justice n'a été faite que le 20 décembre 2002 dans un acte de commandement aux fins de saisie-vente ayant conduit à un acte de saisie-attribution servi le 21 janvier 2003 ; Que bien que cette signification ne soit pas conforme aux prescriptions de l'article 661 précité il a adressé au greffier en chef de la Cour d'appel la déclaration d'appel prévue à l'article 662 du code de procédure civile et signifié le 24 décembre 2002 ladite déclaration à la société d'expertise CAFEC-KA et à son huissier instrumentaire Maître SOME Kokou ; Qu'à la suite de la signification l'ordonnance de taxe, bien que « valant titre exécutoire », ne peut être exécutée qu'après l'expiration du délai d'appel (art. 665 CPC) cet effet suspensif se poursuivant à l'intervention de l'appel conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile ;

Que le titre n'étant pas exécutoire, il ne peut servir de fondement à une saisie-attribution, l'article 153 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution exigeant pour cette voie d'exécution un titre exécutoire ; que le saisi est fondé à élever la contestation sur la validité de ce titre dans les formes indiquées aux articles 169 à 170 de l'acte uniforme précité devant le juge national des référés, celui-ci, statuant dans les fonctions de juge de l'exécution, en étant compétent aux termes des articles 49 de l'acte uniforme précité, et 433 et 464-2è du code de procédure civile ; Que c'est vainement que l'expert s'appuie sur la transmission le 20 septembre 2002 à COLINA Assurances de sa facture n° 061-02/CA du 18 septembre 2002 de même montant que celui de l'ordonnance de taxe pour prétendre à une signification de ladite ordonnance ;

Attendu que l'intimé conclut à la confirmation de l'ordonnance déférée en ce que c'est à bon droit que le juge des référés s'est déclaré incompétent à modifier ou à suspendre l'exécution d'un titre exécutoire comme le lui prescrit l'article 433 du code de procédure civile ; Que la saisie-attribution pratiquée en vertu d'une ordonnance de taxe revêtue de la formule exécutoire ne peut être déclarée nulle parce que d'une part cette nullité n'est prévue par aucun texte, alors qu'il n'y a point de nullité sans textes, et que d'autre part aucun grief n'est prouvé, alors qu'il n'y a point de nullité sans griefs, (art. 139 al. 1er et 140 al. 1er C.P.C.) ; Que l'appelant qui en barre d'instance avait réclamé l'annulation de la saisie-attribution (cf. requête abréviative de délai et assignation en référé), demande en barre d'appel de faire cesser un trouble manifestement illicite sans indiquer la mesure idoine alors que la loi ne donne au juge des référés que compétence pour prescrire une mesure de remise en état en vue de faire cesser un trouble manifestement illicite (art. 464-2è C.P.C.)

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l'appel relevé le 24 mars 2003 contre une ordonnance de référé contradictoirement rendue le 14 mars 2003 remplit les conditions de forme et de délai de la loi et mérite en conséquence d'être déclaré recevable ;

Attendu que le juge des référés est saisi en contestation d'une saisie-attribution pratiquée ; que cette forme de saisie est une mesure d'exécution forcée (art. 28 et s. AUPSVE) ; Qu'aux termes de l'article 49 de l'acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution « la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie-conservatoire est le président du tribunal statuant en matière d'urgence ou le magistrat délégué par lui » ; Que la juridiction compétente est désignée par la loi nationale (art. 2 Traité OHADA) ; Qu'au plan national le juge des référés, juge de l'exécution, est le Président du Tribunal de grande instance ou le magistrat par lui désigné (art. 422, 433 et 464 C.P.C.) ; Que c'est à tort que le premier juge s'est déclaré incompétent, sa compétence en tant que juge de l'exécution portant sur « tout litige ou toute demande...» sans qu'il ait lieu de distinguer entre annulation d'une saisie, mainlevée, invalidité d'un titre exécutoire ou toute autre décision ou mesure ; Que les contestations de saisie-attribution, déférées au juge de l'urgence dans les conditions prévues aux articles 169 à 172 de l'acte uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et aux voies d'exécution, sont par lui examinées en vertu des compétences que lui attribue l'article 49 précité (CA Ouagadougou ord n° 51 du 19 décembre 2002, n° 55 du 26 décembre 2002 et TGI Ouagadougou ord n° 64 du 24 avril 2002) ;

Attendu qu'une saisie-attribution ne peut être valablement pratiquée qu'en vertu d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible (art 153 AUPSVE) ; qu'à titre indicatif, l'article 33 dudit acte cite des titres exécutoires parmi lesquels, les décisions juridictionnelles revêtues de la formule exécutoire, celles qui sont exécutoires sur minute ; que sont de celles-là, les ordonnances de référé et les ordonnances sur requête (art. 468 et 471 C.P.C.) ; Que prima facie, l'ordonnance de taxe rendue sur requête en fait partie (art. 657 C.P.C.)