Journal officiel du Cameroun
LOI N° 61-6 DU 04 Avril 1961 - CREANT UN TRIBUNAL CRIMINEL SPECIAL
Vu la constitution du 4 mars 1960 ;
L'Assemblée nationale a délibéré et adopté ;
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
CHAPITRE PREMIER
Du tribunal criminel spécial
Art. premier — Il est institué un tribunal criminel spécial compétent pour connaître :
Des soustractions commises par les dépositaires ou comptables publics prévues par les articles 169 à 172 du code pénal ;
Des abus de confiance qualifiés d'un montant supérieur à 1 million de francs CFA commis au préjudice de toute personne ;
Des crimes et délits connexes.
Art. 2 — Le tribunal criminel spécial siège à Yaoundé. Il peut siéger en audience foraine en cas de nécessité, en tel lieu désigné par son président sur proposition du ministère public.
Le tribunal criminel spécial est composé :
Du président de la chambre des comptes de la cour suprême : président ;
De deux conseillers à la cour suprême, l'un en service ordinaire, l'autre en service extraordinaire à la chambre des comptes ;
Du procureur général près la cour d'appel de Yaoundé, chargé de l'exercice de l'action publique ;
Du greffier en chef de la cour d'appel de Yaoundé, greffier.
En attendant la désignation des magistrats de la chambre des comptes de la cour suprême et l'installation de cette haute juridiction, le président du tribunal criminel spécial sera désigné parmi les magistrats du siège de la cour suprême, du tribunal d'Etat ou de la cour d'appel de Yaoundé, par décret pris sur la proposition du conseil supérieur de la magistrature. Les deux membres du tribunal criminel spécial seront choisis dans les mêmes formes, l'un parmi les magistrats du siège de la cour suprême ou d'une cour
d'appel, l'autre, après avis des ministres intéressés, parmi les membres de l'inspection des finances, les directeurs du ministère des finances, le directeur du Trésor ou le trésorier central de Yaoundé.
Le tribunal criminel spécial relève de l'autorité du garde des sceaux, ministre de la justice.
CHAPITRE II
Des peines
Art. 3 — Les soustractions commises par les dépositaires et comptables publics prévues par les articles 169 et 170 du Code Pénal sont punies des travaux forcés à perpétuité.
Dans le cas prévu par l'article 171 du code pénal, les mêmes soustractions sont punies des travaux forcés à temps.
Par l'effet de l'application des circonstances atténuantes, la peine ne peut être réduite au-dessous de vingt années de travaux forcés pour les coupables des crimes prévus aux articles 169 et 170, et au dessous de dix années de travaux forcés pour les coupables des crimes prévus à l'article 171 du code pénal.
Art. 4 — Devant les juridictions ordinaires le bénéfice de l'article 463 du code pénal et de la loi du 26 mars 1891 ne peut être accordé aux auteurs :
D'abus de confiance qualifiés ;
De vols, escroqueries ou abus de confiance commis au préjudice de l'Etat, d'une collectivité publique, d'un établissement ou organisme fonctionnant à l'aide de fonds publics ;
De concussion, corruption et trafic d'influence.
En outre, les peines seront portées au double.
Lorsque les délits de concussion, corruption ou trafic d'influence auront été commis dans l'exercice de leurs fonctions par des fonctionnaires ou agents publics, membre des cabinets ministériels, directeurs ou chefs de service de ministères, préfets, sous-préfet, adjoints préfectoraux ou d'arrondissements, chefs de districts et responsables départementaux de tous services, les coupables subiront le maximum de la peine.
Les infractions prévues au présent article seront instruites et jugées en priorité et au plus tard dans les deux mois. Les demandes de mise en liberté provisoire sont irrecevables.
Ch. ASSALE
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
VICTOR KANGA.
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