Journal officiel du Sénégal

LOI n° 2008-05 du 24 Janvier 2008 autorisant le Président de la République à ratifier la Convention de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) sur les Armes légères et de Petit Calibre, leurs Munitions et autres Matériels connexes, adoptée à Abuja (Nigéria) le 14 Juin 2006.

EXPOSE DES MOTIFS

Face à la prolifération des armes légères et de petit calibre et, conscients de leurs conséquences désastreuses sur le développement économique et social, les Etats membres de la CEDEAO ont affirmé leur engagement à mettre fin à ce fléau.

C'est ainsi que les Chefs d'Etat et de Gouvernement réunis à Abuja, le 31 octobre 1998, ont déclaré un moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères, pour une période de trois (03) ans renouvelable.

En 2001, les Nations unies ont mis en place un Programme d'Action visant à prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.

Les Nations unies y encouragent les Etats « à mener au plan régional et sous-régional des négociations en vue de l'adoption d'instruments pertinents juridiquement contraignants dans le domaine de la lutte contre le commerce et la prolifération des armes légères ».

Le 30 janvier 2003, au cours d'un Sommet tenu à Dakar, les Chefs d'Etat et de Gouvernement de la CEDEAO ont demandé au Secrétariat exécutif d'examiner la possibilité de transformer le Moratoire en une Convention juridiquement contraignante. C'est ainsi que cette Convention a été adoptée, le 14 juin 2006, à Abuja (Nigeria).

Les objectifs de cette Convention sont :

de prévenir et combattre l'accumulation excessive et déstabilisatrice des armes légères et de petit calibre dans l'espace CEDEAO ;

de pérenniser la lutte pour le contrôle des armes légères et de petit calibre ;

de consolider les acquis du moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères et son code de conduite ;

de promouvoir la confiance entre les Etats membres grâce à une action concertée et transparente dans le contrôle des armes légères et de petit calibre ;

de renforcer les capacités institutionnelles et opérationnelles du Secrétariat exécutif de la CEDEAO et des Etats membres dans la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes ;

et de promouvoir l'échange d'informations et la coopération entre les Etats membres ;

Dans le cadre de sa mise en œuvre, la Convention prévoit la création d'une Commission nationale dans chaque pays de la CEDEAO ainsi qu'un certain nombre de mécanismes opérationnels.

Cheikh Hadjibou SOUMARE.

COMMUNAUTE ECONOMIQUE DES ETATS DE L'AFRIQUE DE L'OUEST CONVENTION DE LA CEDEAO SUR LES ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE, LEURS MUNITIONS ET AUTRES MATERIELS CONNEXES.

Publié par le Secrétariat exécutif de la CEDEAO, Abuja – Nigeria.

PREAMBULE

Nous, Chefs d'Etat et de Gouvernement des Etats Membres de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ;

Vu les articles 7, 8 et 9 du Traité révisé de la CEDEAO portant création de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement et définissant sa composition et ses fonctions ;

Vu l'article 58 du Traité révisé de la CEDEAO relatif à la Sécurité régionale qui prescrit aux Etats membres de s'engager à œuvrer à la préservation et au renforcement des relations propices au maintien de la stabilité de la sous-région en créant et en renforçant le mécanisme approprié pour assurer la prévention et la résolution des conflits ;

Vu l'article 77 dudit Traité relatif aux sanctions applicables en cas de non-respect des obligations par un Etat membre ;

Vu les dispositions pertinentes du Protocole relatif à la Cour de Justice de la Communauté du 16 juillet 1991, des Conventions de la CEDEAO sur l'entraide judiciaire en matière pénale et sur l'extradition, respectivement signées à Dakar le 29 juillet 1992 et à Abuja le 6 août 1994 ;

Vu le Protocole de non-agression signé à Lagos le 22 avril 1978 et le Protocole d'assistance mutuelle en matière de défense signé à Freetown le 29 mai 1981, notamment notre détermination à nous apporter mutuellement aide et assistance en matière de défense dans les cas d'agression armée ou de menace d'agression contre un Etat membre :

Rappelant les principes de la Charte des Nations unies, notamment ceux inhérents au droit des Etats à la légitime défense individuelle et collective, la non-intervention et la non-ingérence dans les affaires intérieures d'un autre Etat, et la prohibition de l'usage ou de la menace d'usage de la force.

Rappelant également les dispositions pertinentes de l'Acte constitutif de l'Union Africaine y compris la décision du Conseil Exécutif de l'Union Africaine demandant à la Commission de l'Union Africaine de prendre les mesures nécessaires en vue de la mise en place d'un instrument juridique pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre en Afrique ;

Rappelant aussi le Protocole relatif au Mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité de la CEDEAO signé à Lomé le 10 décembre 1999, notamment en ses articles 3, 50 et 51, relatifs à la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre et leur circulation illicite ;

Prenant en compte les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies relatives à l'Afrique de l'Ouest imposant des embargos sur les armes à l'encontre de pays de la sous-région ;

Prenant également en compte la Déclaration de Bamako du 1er décembre 2000 sur la position commune africaine sur la prolifération, la circulation et le trafic illicites des armes légères et de petit calibre ;

Prenant aussi en compte les autres initiatives internationales, régionales et sous-régionales dans le domaine de la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre ainsi que la décision relative à une position commune africaine sur le processus de révision du Programme d'Action des Nations unies sur les armes légères et de petit calibre, adoptée à Khartoum en janvier 2006 ;

Considérant que la prolifération des armes légères et de petit calibre constitue un facteur déstabilisant pour les Etats membres de la CEDEAO et une menace pour la paix et la sécurité de nos peuples ;

Profondément préoccupés par le flux excessif d'armes légères et de petit calibre vers l'Afrique en général et l'Afrique de l'Ouest en particulier et conscients de la nécessité de contrôles effectifs des transferts d'armes par les fournisseurs et les courtiers ;

Conscients de l'importance de la construction de la paix et de la prévention des conflits en Afrique de l'Ouest, et des conséquences dévastatrices que la prolifération des armes légères et de petit calibre ont sur la prolongation des conflits armés et l'encouragement à l'exploitation illicite des ressources naturelles ;

Conscients de la nécessité de prévenir, combattre et éradiquer la fabrication illicite et l'accumulation excessive et déstabilisante des armes légères et de petit calibre, le trafic et la détention ainsi que l'utilisation de ces armes dont les effets négatifs ont été largement confirmés et observés sur la sécurité de chaque Etat de la sous région, la sécurité humaine, le droit international humanitaire, le développement durable et les droits humains ;

Déterminés à réaliser les objectifs contenus dans la Déclaration du Moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères dans l'espace CEDEAO signée à Abuja le 31 octobre 1998 et dans le Code de conduite pour la mise en œuvre du Moratoire adopté à Lomé le 10 décembre 1999 ;

Déterminés également à consolider les acquis du Moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères et de son Code de Conduite et à prendre en compte leurs faiblesses en vue de les améliorer ;

Reconnaissant à cet égard les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Moratoire grâce aux contributions du Plan d'Action du Programme de Coordination et d'Assistance pour la Sécurité et le Développement (PCASED) ;

Conscients de la nécessité, en vue d'obtenir des résultats, de renforcer les capacités institutionnelles et opérationnelles du Secrétariat exécutif de la CEDEAO dans le domaine de la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre ;

Considérant le Programme d'Action des Nations unies en vue de prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects adopté en 2001 ;

Considérant l'instrument international de l'Organisation des Nations unies (ONU) visant à permettre aux Etats de procéder à l'identification et au traçage rapides et fiables des armes légères et de petit calibre de 2005 ainsi que le Protocole de l'ONU contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions de 2001 ;

Prenant en compte la résolution 1325 (2002) du Conseil de sécurité sur la femme, la paix et la sécurité qui reconnaît le rôle spécifique de la femme dans la construction de la paix.

Profondément préoccupés par l'utilisation des enfants dans les conflits armés, et tenant compte des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur les enfants et les conflits armés :

Reconnaissant l'importante contribution des organisations de la société civile dans la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre ;

Gardant à l'esprit la directive contenue dans le communiqué final du Sommet des Chefs d'Etat et de Gouvernement de la CEDEAO qui s'est tenu à Dakar le 30 janvier 2003, instruisant le Secrétaire exécutif de la CEDEAO d'examiner la possibilité de transformer le Moratoire en une Convention.

Convenons de ce qui suit :

Chapitre premier

Définitions et objectifs

Art. premier  —  Définitions

Aux fins de la présente Convention, on entend par :

1.

ARMES LEGERES : les armes portables destinées à être utilisées par plusieurs personnes travaillant en équipe et comprenant notamment :

les mitrailleuses lourdes ;

les lance-grenades portatifs, amovibles ou montés ;

les canons antiaériens portatifs ;

les canons antichars portatifs, fusils sans recul ;

les lance-missiles et lance-roquettes antichars portatifs ;

les lance-missiles aériens portatifs ;

les mortiers de calibre inférieur à 100 millimètres.

2.

ARMES DE PETIT CALIBRE : les armes destinées à être utilisées par une personne et comprenant notamment :

les armes à feu et toute autre arme ou dispositif de destruction tel que bombe explosive, bombe incendiaire ou bombe à gaz, grenade, lance roquette, missile, système de missile ou mine ;

les revolvers et les pistolets à chargement automatique ;

les fusils et les carabines ;

les mitraillettes ;

les fusils d'assaut ;

les mitrailleuses légères.

3.

MUNITIONS : Ensemble des éléments destinés à être tirés ou lancés au moyen d'une arme à feu ou à partir d'un vecteur, comprenant, entre autres :

les cartouches ;

les projectiles et les missiles pour armes légères ;

les conteneurs mobiles avec missiles ou projectiles pour systèmes anti-aérien ou antichar à simple action.

4.

AUTRES MATERIELS CONNEXES : toutes composantes, pièces ou pièces détachées ou pièces de rechange d'une arme légère ou de petit calibre qui sont nécessaires au fonctionnement d'une arme ou d'une munition : toutes substances chimiques servant de matière active utilisées comme agent propulsif ou agent explosif ;

5.

ILLICITE : tout ce qui est réalisé en violation des dispositions de la présente Convention ;

6.

MARQUAGE : des inscriptions permettant l'identification d'une arme couverte par la présente Convention ;

7.

TRAÇAGE : le suivi systématique du parcours des armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et des autres matériels connexes, depuis le fabricant jusqu'à l'utilisateur final en vue d'aider les autorités compétentes des Etats Membres à détecter la fabrication et le commerce illicites ;

8.

COURTAGE : le travail effectué en tant qu'intermédiaire entre tout fabricant ou fournisseur ou distributeur d'armes légères et de petit calibre et de tout acheteur ou utilisateur, y compris le soutien financier et le transport des armes légères et de petit calibre ;

9.

TRANSFERT : l'importation, l'exportation, le transit, le transbordement et le transport ou tout autre mouvement, quel qu'il soit, à partir du ou à travers le territoire d'un Etat d'armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et autres matériels connexes ;

10.

ACTEURS NON ETATIQUES : tous acteurs autres que les Etats et qui comprennent les mercenaires, les milices armées, les groupes armés rebelles et les compagnies privées de sécurité ;

11.

ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE : dans la présente Convention, cette expression inclut les munitions et autres matériels connexes.

Art. 2 —  Objectifs

Les objectifs de la présente Convention sont de :

1.

prévenir et combattre l'accumulation excessive et déstabilisatrice des armes légères et de petit calibre dans l'espace CEDEAO ;

2.

pérenniser la lutte pour le contrôle des armes légères et de petit calibre dans la CEDEAO ;

3.

consolider les acquis du Moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères et de son Code de conduite ;

4.

promouvoir la confiance entre les Etats Membres grâce à une action concertée et transparente dans le contrôle des armes légères et de petit calibre dans la CEDEAO ;

5.

renforcer les capacités institutionnelles et opérationnelles du Secrétariat exécutif de la CEDEAO et des Etats Membres dans la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et autres matériels connexes ;

6.

promouvoir l'échange d'informations et la coopération entre les Etats Membres.

Chapitre II

Transferts des armes légères et de petit calibre

Art. 3 —  De l'interdiction des Transferts d'armes légères et de petit calibre.

1. Les Etats Membres interdisent le transfert des armes légères et de petit calibre ainsi que les équipements servant à leur fabrication sur/vers et à partir de leur territoire.

2. Les Etats Membres interdisent, sans exception, tout transfert d'armes légères et de petit calibre à des acteurs non étatiques, si ce transfert n'est pas autorisé par l'Etat Membre importateur.

3. Les armes légères et de petit calibre telles que définies dans la présente Convention ne sont pas considérées comme des marchandises au sens de l'article 45 du Traité révisé de la CEDEAO de 1993.

Président de la République du Cap vert

S.E.M. Alieu Ngum

Ministre du Commerce, de l'Industrie et de l'Emploi de la Gambie,

Pour, et par ordre du Président de la Gambie

S.E. Mme Fatoumata Kaba Sidibé

Ministre de la Coopération internationale,

Pour, et par ordre du Président de la République de Guinée

S.E. Blaise Compaoré

Président du Conseil des Minsitres

Président du Faso

S.E. Dr. Albert Mabri Toikeusse

Ministre de l'Intégration africaine

Pour, et par ordre du Président

de la République de Côte d'Ivoire

S.E. John Agyekum Kufuor

Président de la République de Ghana

S.E.M. De Sousa-Rui Dia

Ministre, Président du Conseil des Ministres

Communication sociale et Affaires

Pour, et ordre du Président

de la République de Guinée Bissau

S.E. Mme Ellen Jhoson-Sirleaf

Président de la République du Libéria

S.E.Mamadou Tandja

Président de la République du Niger

S.E.M. Abdou Aziz Sow

Ministre du NEPAD, de l'Intégration

économique africaine et Politique de la Bonne Gouvernance

Pour, et par ordre du Président de la République du Sénégal

S.E.M. Amadou Toumani Touré

Président de la République du Mali

S.E.M. Olusegun Obasanjo GCFR,

Commandant-en-Chef des Forces armées,

Président de la République Fédérale du Nigéria

S.E. Alh. (Dr.) Ahmad Tejan Kabbah

Président de la République de Sierra Léone

S.E.M. Faure Essozimna Gnassingbé

Président de la République Togolaise