Cour Suprême du Cameroun

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Chambre sociale

AFFAIRE:

Abada René

C/

la Société H. de Suarès

ARRET N° 59 DU 14 FEVRIER 1967

LA COUR,

Vu le mémoire ampliatif de Me Icaré, avocat-défenseur à Yaoundé, désigné d'office, déposé le 16 septembre 1966 ;

Sur les deux premiers moyens pris d'une dénaturation des documents de la cause et d'une insuffisance de motifs ;

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir refusé à Abakla les différentes indemnités auxquelles lui donnait droit le licenciement dont il a fait l'objet de la part de son employeur, la Société H. de Suarès, au seul motif que le demandeur aurait démissionné de son emploi, alors que la lettre d'Abada, sur laquelle se fonde le juge d'appel, posait simplement la question de l'opportunité de conserver l'employé en raison de la déficience de son état physique et .mental consécutive à l'accident du travail dont il avait été victime ;

Attendu que, pour rejeter les demandes d'indemnités de Abada à la suite de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée le liant à la Société H. de Suarès, le jugement, dont l'arrêt attaqué s'est approprié les motifs, se borne à relever « qu'Abada n'a pas été licencié « de son service mais a plutôt démissionné de son propre chef ainsi que « cela résulte de sa lettre en date du 23 mars 1963 versée au dossier » ;

Attendu que l'incertitude que relève cette rédaction quant aux circonstances de la rupture du contrat ne justifie pas le rejet des indemnités de préavis et de licenciement ;

Qu'il appartient, en effet, au juge de fond de déterminer l'auteur de la rupture pour l'application de l'article 38 du Code du travail ;

Attendu qu'il résulte, d'autre part, de la lettre, adressée; le 23 mars 1963, par Abada à son employeur et sur laquelle se. fonde le jugement, que le demandeur invoquait une aggravation, constatée par certificat médical, de l'invalidité consécutive à l'accident de travail dont il avait été victime, pour demander le règlement de tous ses « droits », spécifiant que la cessation de travail ne lui était pas imputable ;

Que c'est par une dénaturation de ce document qu'il a été interprété comme exprimant la volonté du travailleur que de rompre le contrat, ce qui équivaudrait à une renonciation, prohibée par la loi, aux avantages que conférait à l'intéressé la législation sur la réparation des accidents du travail ;