TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBO-DIOULASSO

(BURKINA FASO)

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AFFAIRE:

AD SANOU S. Siméon

C/

OUEDRAOGO Lassané

Jugement n° 219 du 21 juin 2006

LE TRIBUNAL

FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par exploit d'huissier du 21 avril 2004, les ayant-droits de feu SANOU S. Siméon, madame SEGUEDA née OUEDRAOGO Rakiétou et monsieur SEGUEDA Sibidou ont fait assigné OUEDRAOGO Lassané devant le Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso aux fins de

- rétractation de l'ordonnance n° 144/2001 du 18 juillet 2001 ;

- l'expulsion de OUEDRAOGO Lassané du télécentre situé sur la parcelle A lot 1300 sise au secteur 15 de Bobo-Dioulasso et l'allocation de la somme de deux millions quatre cent cinquante (2.450.000) francs CFA aux requérants à titre de dommages intérêts ;

- prononciation de l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

A l'appui de leurs demandes, les requérants exposent que dame SEGUEDA née OUEDRAOGO Rakiétou s'est séparée de OUEDRAOGO Lassané avec qui elle exploitait un télécentre pour monter sa propre affaire suite à des mésententes intervenues entre eux ; Que pour ce faire, elle a concluait un contrat avec feu SANOU S. Siméon qui l'autorisait à édifier sur la parcelle A du lot 1300 sise au secteur 15 de Bobo-Dioulasso un local d'une valeur de huit cent trente mille quatre cent quinze (830.415) francs CFA où elle exploitera son télécentre ; Que son bâtiment construit, elle concluait avec l'ONATEL le contrat n° 45/99/DG ONATEL/DRO/Bobo pour l'exploitation de son télécentre avec le numéro d'appel 97-45-15 ; Qu'ayant fermé son télécentre après quelques temps d'exploitation suite aux intrigues de OUEDRAOGO Lassané qui a abouti à la suspension de sa ligne, celui-ci obtiendra du président du Tribunal l'ordonnance n° 141/2001 l'autorisant à s'installer dans le télécentre de Dame SEGUEDA ; Que les ayant-droits de feu SANOU S. Siméon ayant remarqué cette occupation sans titre ni droit essayaient par deux fois et en vain de l'expulser la voie des référés, parce que n'ayant pas obtenu cette expulsion ils décidaient de l'attraire devant le Tribunal de céans pour obtenir la rétractation de l'ordonnance susmentionnée en ce qu'elle est fondée sur des motifs faux et parce que l'exposé même de l'ordonnance démontrait qu'il y avait litige et que la juridiction du président n'était pas par conséquent compétente pour en connaître ; Qu'ensuite ils sollicitent l'expulsion de OUEDRAOGO Lassané en ce que son occupation est sans titre ni droit ; Qu'en effet, l'explication selon laquelle Dame SEGUEDA lui serait débitrice et qu'il se serait subrogé à ses droits relève d'une gymnastique et constitue une violation flagrante du principe de l'effet relatif des contrats posé à l'article 1165 du code civil ; Que OUEDRAOGO Lassané est un tiers dans le contrat signé entre feu SANOU S. Siméon et Dame SEGUEDA et ne peut par conséquent pas en bénéficier de même que la famille de feu SANOU Siméon est étrangère à la créance existant entre Dame SEGUEDA et OUEDRAOGO Lassané et ne doit en aucune manière en souffrir ; Que l'occupation du local par ce dernier est donc illégale et son expulsion s'impose ; Que cette occupation illégale leur causant un préjudice, ils réclament des dommages-intérêts sur la base de l'article 1382 du code civil ; Que les conditions posées par cet article sont réunies en ce que l'occupation illégale constitue une faute, la perte de revenus le préjudice et le lien de cause à effet est d'une évidence ; Que c'est pourquoi les ayants droits de feu SANOU S. Siméon réclament la somme de quatre cent cinquante mille (450.000) francs CFA et les époux SEGUEDA la somme de deux millions (2.000.000) de franc CFA pour la réparation de leur préjudice respectif ;

En réplique le défendeur expose qu'il est propriétaire de la ligne téléphonique servant de télécentre en atteste les diverses pièces qu'il fournit ; Qu'il est dans le local querellé en vertu d'un contrat de bail conclu avec feu SANOU S. Siméon ; Qu'en outre il a contribué à l'édification dudit local ; Que pour la présente procédure, en la forme il sollicite la nullité de l'exploit d'assignation en ce qu'il méconnaît les dispositions de l'article 81 du code de procédure civile et ce, sur le fondement des articles 99 et 100 du même code qui sanctionne de nullité les manquements aux dispositions de l'article 81 précité ; Qu'au fond, le Tribunal doit se déclarer incompétent s'agissant de la rétractation de l'ordonnance n° 141/2001 du 18 juillet 2001 ; Qu'en effet, au sens des articles 471, 472 et 473 du code de procédure civile seul le président qui a rendu l'ordonnance a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance que concernant son expulsion, il est lié à la famille de feu SANOU S. Siméon par un bai commercial ; Que la résiliation d'un tel contrat obéit à des conditions strictes posées par l'Acte uniforme OHADA sur le droit commercial général ; Que sans avoir résilié le contrat conformément à l'acte sus-cité notamment en ses articles 91 et suivants, son expulsion ne peut être pour suivie ; Que de ce point de vue, les requérants ne peuvent qu'être purement et simplement déboutés en leur demande comme étant mal fondés ; Que concernant le paiement de dommages-intérêts pour cause de faute et de préjudice, il n'en est rien ; Qu'en effet, il n'a pas occupé la maison illégalement et en outre, il s'acquitte du loyer convenu devant témoin avec feu SANOU S. Siméon ; Qu'il a en plus contribué à l'édification du local querellé ; Que les époux SEGUEDA ne peuvent alléguer avoir perdu un fonds de commerce et subséquemment des revenus en ce qu'il est établi que la ligne téléphonique est en son nom ; Qu'il plaira par conséquent au Tribunal rejeter leur demande ; Que reconventionnellement il sollicite du Tribunal la condamnation des requérants à lui payer la somme de cinq cent mille (500.000) francs CFA à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 15 du code de procédure civile ; Que l'action des requérants est sans fondement, malicieuse, vexatoire et dilatoire ; Qu'enfin, il réclame le remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens qu'il a engagés pour sa défense conformément à l'article 06 de la loi n° 028/2004/AN du 08 septembre 2004 ; Qu'à ce titre il réclame sept cent cinquante mille (750.000) francs CFA ;