Cour Suprême du Cameroun

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Chambre sociale

AFFAIRE:

Entreprise Lauwagie et d"

C/

Yega Samuel

ARRET N° 40 DU 16 JANVIER 1968

LA COUR,

Vu le mémoire ampliatif de Me Danglemont, avocat-défenseur à Yaoundé, déposé le 30 juin 1967 ;

Sur le premier moyen, pris d'une violation des articles 3, paragraphe 2, et 37, paragraphe 2, de l'ordonnance du 17 décembre 1959, portant organisation judiciaire de l'Etat, 40 et 42 du Code du travail, insuffisance de motifs et manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué a condamné la Société Lauwagie à payer à Yega Samuel l'indemnité de préavis prévue, en cas de rupture unilatérale d'un contrat de travail à durée indéterminée, par l'article 40, 1er alinéa, visé au moyen, sans avoir constaté l'existence de la faute lourde alléguée par l'employeur comme motif de licenciement et qui, aux termes de l'article 40, 2° alinéa, visé au moyen, justifiait une rupture sans préavis ;

Attendu que la preuve de la faute lourde, prévue par l'article 40, justifiant la rupture sans préavis du contrat de travail, incombe à celui qui l'allègue ;

Qu'ainsi, dès lors que la Société Lauwagie n'avait pas rapporté la preuve de divers manquements dans le service, qu'elle imputait comme faute lourde à Yega, pour justifier son licenciement sans préavis, l'arrêt n'avait pas à constater que Yega avait rapporté la preuve contraire des faits allégués contre lui, pour condamner la Société Lauwagie à lui payer l'indemnité de l'article 40 ;

Que par suite le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi, pris d'une violation des articles 3, paragraphe 2, et 37, paragraphe 2, de l'ordonnance du 17 décembre 1959 et 42 du Code du travail, insuffisance et contradiction de motifs, manque de base légale, en ce que l'arrêt a condamné la Société Lauwagie à payer à Yega des dommages-intérêts pour rupture abusive de contrat de travail, sans avoir constaté l'abus commis par elle dans l'exercice de son droit de rompre le contrat ;

Attendu que l'arrêt énonce « que, selon les témoignages recueillis, Yega a été licencié pour avoir été surpris en train de dormir pendant les heures de service ; que cependant le motif ci-dessus n'a guère été soulevé par l'employeur, d'après lequel le congédiement de Yega fait suite aux nombreuses lettres d'avertissement et de mise à pied qui lui étaient adressées pour des faits dont la répétition et la continuité constituent une faute lourde ; que cependant les quatre témoins entendus n'ont pas été en mesure de dire si oui ou non Yega a commis ces autres manquements au cours de l'exécution du contrat de travail ; qu'en l'absence de tels renseignements et face aux constatations du travailleur, il apparaît difficile à la Cour d'admettre que les fautes évoquées sont réelles... ; que l'enquête diligentée par la Cour n'a pas déterminé la légitimité des motifs ni même la réalité des griefs par l'employeur » ;

« Que par suite, le caractère illusoire des motifs avancés par l'Entreprise Lauwagie se trouve établi et la demande de dommages et intérêts fondée » ;