Cour Suprême du Cameroun

-------

Chambre Pénale

AFFAIRE:

Baba Mohaman

C/

Ministère Public et Ngarakpa Thomas et autres

ARRET N°340/P DU 14 AOUT 1980

LA COUR,

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation et de la fausse application de l'article 1384 (1) du code civil, contrariété de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris qui, pour homicide et blessures involontaires dont les enfants de Garba Tsirono avaient été victimes, avait relaxé le prévenu Ngarakpa Thomas et avait ensuite retenu sa responsabilité civile ainsi que celle de son mandant, en adoptant la motivation du premier juge d'après laquelle « profitant de l'absence du chauffeur des enfants, dont les deux victimes de l'accident, sont entrées dans le véhicule et se sont mises à manipuler les leviers de frein et de vitesse..., c'est à cette occasion que le véhicule s'est mises à rouler seul pour aller échouer sur une maison, Ngarakpa Thomas n'était pas même à bord de la voiture au moment de l'accident » ;

Alors qu'il résulte de cette rédaction que le prévenu et le civilement responsable, Garba Mohaman, s'étaient vus dépossédés de la garde du véhicule par les enfants qui y étaient montés de leur propre —et malencontreuse initiative— en avaient pris les commandes et en même temps l'usage, la direction et le contrôle, et que l'article 1384 du code civil ne saurait donc s'appliquer en l'espèce, puisque le juge lui-même a constaté que Ngarakpa Thomas n'avait plus la garde du véhicule et le Tribunal ne pouvait donc, sans se contredire, relaxer Ngarakpa et retenir néanmoins sa responsabilité civile et celle du civilement responsable ;

Attendu qu'aux termes de l'article 10 de la loi n°58-203 du 26 décembre 1958 portant adaptation et simplification de la procédure pénale « la juridiction répressive saisie d'une action civile pour homicide ou blessures involontaires peut, malgré le relaxe du prévenu, accorder des dommages-intérêts aux parties civiles sur la base de l'article 1384 (1) du code civil » ;

Attendu qu'en l'espèce Ngarakpa Thomas avait laissé sa « voiture au bord de la route pour aller acheter de l'essence » et que c'est alors que les enfants victimes de l'accident ont profité de son absence pour manipuler les organes du véhicule qui a roulé «seul pour aller échouer sur une maison » ;

Attendu qu'en agissant comme il l'avait fait, Ngarakpa Thomas n'avait pas perdu la garde juridique de la voiture et doit supporter la responsabilité de tout risque causé par ledit véhicule ;

Que c'est donc à bon droit et en application de l'article 10 de la loi n°58-203 du 26 décembre 1958 portant adaptation et simplification de la procédure pénale que le juge d'appel , statuant en matière répressive, saisi d'une action civile pour homicide et blessures involontaires, malgré la relaxe de Ngarakpa Thomas, a retenu la responsabilité civile de ce dernier ainsi que celle de son civilement responsable et a accordé des dommages-intérêts à Garba Tsirono, partie civile, sur la base de l'article 1384 (1) du code civil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;