Cour Suprême du Cameroun
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Chambre sociale
AFFAIRE:
Compagnie Air-Cameroun
C/
Etoh Mbang Jacques
ARRET N° 23 DU 7 DECEMBRE 1971
LA COUR,
Vu, le mémoire ampliatif déposé le 14 août 1971 par Me Aubriet, avocat-défenseur à Douala ;•
Sur le moyen .soulevé d'office pris de la violation des articles 41 du Code du travail 3, paragraphe 2, et 37, paragraphe 2 , de l'ordonnance du 17 décembre 1959, insuffisance de motifs, dénaturation des faits de la cause et manque de base légale, en ce que le juge -d'appel après avoir noté que le motif du licenciement était un rapport de gendarmerie, a cependant décidé que l'employeur avait agi avec légèreté blâmable et avec l'intention de nuire au travailleur, alors qu'il se contentait .d'affirmer « qu'il est plausible que les faits reprochés à Etoh Mbang sont sans fondement ainsi subsiste au moins un doute qui interdisait de proclamer l'intention coupable de l'employeur ;
Attendu que le juge d'appel a énoncé « considérant qu'il est bien certain que c'est le rapport de gendarmerie qui a été l'unique motif de licenciement du travailleur, qu'il est bien symptomatique de lire dans ce rapport et à la fin « en conséquence si vous ne liquidez pas cet agent de l'aéroport de Yaoundé avant la fin de ce mois en cours, je me trouverais dans l'obligation d'écrire contre vous-même » ; que ces propos constituent un chantage manifeste destiné à faire pression sur l'employeur afin de licencier injustement un honnête travailleur ; considérant que si les faits articulés par le gendarme étaient réels, il aurait procédé immédiatement à l'arrestation d'Etoh Mbang sans avoir à recourir aux manoeuvres de chantage sans résultat ; qu'en tout état de cause il est plausible que les faits reprochés à Etoh Mbang sont sans fondement ; qu'en conséquence l'employeur qui a cédé au chantage pour licencier un honnête travailleur a agi avec une légèreté blâmable et avec une intention de nuire au travailleur ; qu'ainsi il a commis une faute dans l'exercice de son droit de rupture » ;
Attendu que le fait pour l'employeur de n'avoir pas mis en doute le rapport du commandant de brigade de gendarmerie de l'Aéroport de Yaoundé, autorité chargée du maintien de l'ordre dans cet. établissement et de la constatation des infractions commises, ne saurait lui être imputé à faute ; qu'on ne peut déduire ni une intention de nuire ni même une légèreté blâmable du représentant de la Compagnie Air-Cameroun de la confiance faite aux actes de l'autorité compétente ;
Attendu que de même, le. « chantage » invoqué par le juge d'appel pose comme principe que l'employeur en connaissait la nature; ce qui n'est nullement démontré par le contexte de l'arrêt ; que cela exclut encore l'intention de nuire ou la légèreté blâmable ;
Attendu au surplus que l'expression « il est plausible ». utilisée par le juge d'appel montre qu'il existait au moins un doute sur le fondement ou le non-fondement des faits reprochés, doute qui ne permettait pas de retenir une faute à la charge de l'employeur ;
Attendu enfin, que l'hypothèse émise par le juge d'appel sur ce qu'aurait fait le gendarme si les faits articulés par lui étaient réels, ne saurait démontrer la faute de l'employeur, la carence éventuelle de l'agent de l'autorité étant sans influence sur son comportement ;
D'où il suit que la Cour d'appel n'a pas justifié par des motifs suffisants sa décision ; que celle-ci manque de base légale et encourt la cassation.
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