Cour Suprême du Cameroun

-------

Chambre Pénale

AFFAIRE:

Procureur Général près la Cour d'Appel de Garoua

C/

Toutouh Oumarou

ARRET N°226/P DU 2 MAI 1985

LA COUR,

Vu le mémoire ampliatif de Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de Garoua, déposé le 19 mars 1984 ;

Sur le moyen unique de cassation pris d'une dénaturation des faits de la cause et, d'une violation de l'article 322 alinéa 3 du code pénal ;

Attendu que le délit de rétention sans droit de la chose d'autrui, vise le cas d'une personne qui, étant à l'origine de bonne foi, apprend ensuite qu'elle n'a aucun droit sur la chose et la retient quand même ; qu'il suppose, d'autre part, que la chose objet de la rétention se trouve toujours en son état primitif entre les mains du détenteur et peut, au plan civil, faire l'objet d'une action en revendication ;

Attendu que le jugement rendu le 24 février 1982 par le Tribunal de Grande Instance de Garoua, et dont les motifs ont été purement et simplement adoptés, relève que «Toutouh Oumarou, Agent enquêteur de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale, a déclaré que lors de l'ouverture des bureaux à la Caisse le 28 novembre 1981, il a constaté que les papiers étaient éparpillés par terre ; qu'il a ainsi ramassé deux mandats d'un montant respectif de 55.549 francs et 100.419 francs qui traînaient par terre sans pièces justificatives ; qu'il s'est dirigé tout droit aux Postes et Télécommunications pour prendre contact avec Pandan Pandandi chargé des mandats ; qu'après de multiples transactions avec le susnommé il a accepté de payer ces mandats moyennant sa quote-part (sic) ; qu'il reconnaît avoir reçu du payeur des Postes et Télécommunications la somme de 79.000 francs» ;

Attendu qu'au vu de ces énonciations qui ne laissent subsister le moindre doute ni sur la mauvaise foi de l'accusé qui n'a pu, dès l'origine, ignorer que les mandats trouvés dans les bureaux de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale étaient la propriété exclusive de cet organisme, ni sur le détournement dont ces titres ont, par la suite, fait l'objet de sa part, le jugement, et partant, l'arrêt confirmatif attaqué, n'ont pu, sans dénaturer les faits de la cause, décider que les faits reprochés à l'accusé et qualifiés, à tort, d'escroquerie aggravée par l'ordonnance de renvoi, rentraient dans les prévisions de l'article 322 alinéa 3 du code pénal, texte dont il a ainsi été fait une mauvaise application ;

D'où il suit que le moyen est fondé ;

PAR CES MOTIFS

CASSE ET ANNULE l'arrêt n°72/cr rendu le 16 septembre 1983 par la Cour d'Appel de Garoua ;